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Le monde des psys – et sans doute surtout le travail en institution – côtoie, croise, et recoupe le champ du social. Il me semble que l’engagement que cette voie requiert déborde souvent des questions uniquement « psy » pour s’intéresser également à la société, aux normes qu’elle construit et qui forment nos outils (et nos conditions) de travail.

Voilà donc pour nourrir ces questionnements, les conférences gesticulées, mi-théâtre, mi-conférence, mêlant humour et informations (ou plutôt contre-vérités), bref, une conférence, mais avec de grands gestes. Affichées comme anti-capitalistes, ces conférences abordent des sujets de société sous un angle un peu décalé, éclairés par l’histoire et réinterrogeant le langage courant, dans le but d’engager une réflexion collective.


Un exemple: la conférence de Frank Lepage intutilée « l’éducation populaire, monsieur, ils n’en ont pas voulu ». A partir de son expérience de directeur chargé du développement culturel, ce conférencier gesticulant explique comment se diffuse la culture, entre les ministères et le terrain et, pour ce faire, comment sont distribuées les subventions aux centres culturels et à leur projet. De là découle une réflexion sur les mots du pouvoir: pour obtenir une subvention, il faut apprendre un certain langage, celui qui se forme au ministère de la Culture. Partant de cette forme de contrôle par le pouvoir, Frank Lepage démonte la logique selon laquelle la démocratisation de la culture permettrait le développement économique et social.

« J’ai arrêté de croire à la culture, entendons-nous bien, c’est idiot comme phrase ! Non, j’ai arrêté de croire, pour être très précis, en cette chose qu’on appelle chez nous la démocratisation culturelle… C’est l’idée qu’en balançant du fumier culturel sur la tête des pauvres, ça va les faire pousser et qu’ils vont rattraper les riches ! Qu’on va les « cultiver » en somme.« 

Frank Lepage rappelle l’histoire et la transformation du ministère de la culture, ainsi que ce que fût l’éducation populaire. Sa réflexion permet de réinterroger le principe de l’ascension sociale par le biais de la culture ou encore celui de l’égalité des chances, autant de concepts opérants dans notre société.

« Un philosophe aujourd’hui oublié, Herbert Marcuse, nous mettait en garde : nous ne pourrions bientôt plus critiquer efficacement le capitalisme, parce que nous n’aurions bientôt plus de mots pour le désigner négativement. 30 ans plus tard, le capitalisme s’appelle développement, la domination s’appelle partenariat, l’exploitation s’appelle gestion des ressources humaines et l’aliénation s’appelle projet. Des mots qui ne permettent plus de penser la réalité mais simplement de nous y adapter en l’approuvant à l’infini. « 


Autre exemple: « De l’idéologie médicale aux normes sociales, où comment la santé m’a rendu malade ! « , par Benjamin Cohadon qui nous rapporte son expérience en médecine et questionne la dimension de l’accompagnement et du vécu subjectif de leur maladie par les patients. L’idéologie médicale qu’il décrit, c’est d’abord un diagnostic, le patient est oublié derrière sa maladie.

« La santé nous concerne tous et pourtant est très personnelle. Elle est en même temps sociale et individuelle. Il en est de même pour la maladie, comme pour la folie, comme pour la souffrance, comme pour l’inacceptable. Définir et contrôler la santé, c’est donc définir et contrôler les Humains ainsi que la société dans laquelle ils vivent. À l’inverse, rendre aux Humains le pouvoir d’être réellement acteurs de leur santé et de celle de leur entourage, c’est leur redonner le pouvoir d’agir, de vivre, et de décider de la vie qu’ils souhaitent mener. »


Ou encore: Les normes, piège ou solution?   par Régine Mary, explique en quoi les normes auxquelles on répond de plein gré dans l’idée de gagner en qualité,  peuvent enfermer dans des carcans. Faisant l’éloge de la désobéissance, elle nous rappelle que faire face à l’imprévisible et au hors-norme peut être enrichissant.


D’autres sujets pour d’autres conférences: le travail, l’économie sociale et soliTaire, la faim de pétrole, la transition énergétique, une autre histoire du sport, etc etc etc, à retrouver sur les sites des conférenciers:

Les conférences gesticulées du Pavé