Les rêves rendent compte d’une époque, telle est l’hypothèse de cet ouvrage de Charlotte Béradt dans lequel elle recueille les rêves d’hommes et de femmes vivant sous le IIIème Reich de 1933 à 1939.

Pour Charlotte Beradt, ce travail de retranscription s’inscrit dans une volonté de résistance au régime politique, leur contenu pouvant être lu comme discréditant le pouvoir nazi et ses figures. D’ailleurs, communiste à l’époque, Charlotte Beradt sélectionne intentionnellement les rêves qu’elles considère typiques et reflétant l’assujettissement des âmes à la terreur nazie. Elle enverra ses écrits aux Etats-Unis en 1940 avant de s’y réfugier.
De fait, la théorie freudienne de l’analyse des rêves n’est pas reprise rigoureusement dans cet écrit qui est surtout d’ordre politique.

La plupart des récits mettent en effet en jeu les dirigeants politiques de l’époque incarnant des figures de toute-puissance, sur un versant sadique ou séducteur; ou encore le sentiment de surveillance et l’éradication de la sphère du privé, jusque dans le sommeil. Tous ces récits mettent en lumière le conflit que la situation politique suscite chez le rêveur entre la crainte de se rebeller et le désir d’adhérer à l’« ordre nouveau ».

L’originalité de ce livre réside essentiellement dans la tentative de mettre en lumière la part de l’histoire et du politique dans les processus de subjectivation et dans les formations de l’inconscient ; ce qui ne peut exclure la singularité du sujet.