Jimmy P. de Arnaud Desplechin
Jimmy P. est une film de Arnaud Desplechin.
Le film montre dans un premier temps un homme, Indien, souffrant d’un traumatisme physique et/ou psychique.
L’équipe de soignants qui l’accueille a des difficultés à entrer en relation avec lui. Lors d’une passation du TAT avec un psychologue, Jimmy regarde la planche mais ne peut répondre à la question « Que voyez-vous sur cette planche ? ». Cet outil clinique ne signifie rien pour lui. Il parle alors d’un rêve qu’il fait toutes les nuits. Le psychologue, déboussolé, interprète sa réponse comme un refus d’obtempérer aux règles du test. Pourtant Jimmy livre à ce moment un important matériel psychique.
Les soignants de la première partie du film représentent une médecine occidentale qui catégorise les « malades », les mettent dans des cases. Cependant, ils ont l’éthique professionnelle et l’humilité nécessaires pour contacter un spécialiste de l’ethnopsychiatrie et admettre que leur diagnostic peut être erroné.
Dans le film, Georges Devereux, ethnologue et psychanalyste, semble beaucoup plus libre dans sa pratique. Il se base sur l’entretien, l’écoute, l’interprétation et s’utilise lui-même préférentiellement comme outil.
De son vivant, G. Devereux a beaucoup réfléchi sur le lien qui pouvait être fait entre la psychanalyse et la culture. Il distinguait trois cadres de psychothérapie en rapport avec le culturel : l’intra-culturel dans lequel le psychothérapeute et le patient partagent la même culture ; l’inter-culturel dans lequel le psychothérapeute ne partage pas la culture du patient mais la connaît bien ; et le métaculturel dans lequel le psychothérapeute ne connaît pas la culture du patient mais comprend cependant le concept de culture et ce que cela implique.
Le cas de Jimmy P. illustre une psychothérapie de type métaculturelle : G. Devereux connaît la culture du peuple Indien Mohave mais ne connaît pas celle des Black Foot, peuple auquel Jimmy appartient.
L’alliance thérapeutique entre le psychanalyste et Jimmy est possible grâce à l’intérêt que montre G. Devereux à l’homme en face de lui. Il le considère dans sa globalité et l’interroge dans un premier temps sur son peuple d’origine et la signification de son nom dans sa langue maternelle. « Parler dans sa langue, c’est être chez soi » disait un intervenant lors d’une conférence sur la clinique transculturelle.
Les vécus psychique et émotionnel de Jimmy P., et la manière dont il les exprime, sont analysés au regard des éléments culturels. Cependant la culture du patient n’est pas à chaque fois mise au centre de la thérapie. En effet, le psychanalyste explique à Jimmy qu’il peut dire les choses librement comme cela vient. La culture vient parfois éclairer les difficultés dans lesquelles il se trouve et les éléments culturels font alors office de leviers thérapeutiques. Ils ne sont cependant utilisés que s’ils ont un sens dans le processus thérapeutique.
En effet, le psychothérapeute se garde bien de montrer une quelconque « fascination » face à « l’exotisme » de son patient (soit un intérêt décuplé pour la culture de l’autre, où l’« admiration » empêche d’entrer en contact avec l’humain).
Ainsi, G. Devereux, allongé sur le sofa chez son analyste dira qu’il n’a pas aidé Jimmy car c’était un Indien mais parce que « nous étions deux hommes recherchant un sens commun ».
Pour en savoir plus sur Georges Devereux, ethnologue et psychanalyste, ici une émission radiophonique de Psycogitatio.