Pour une psychiatrie bientraitante – expériences et réflexions d’une patiente et d’un infirmier
Laurence Martin, patiente, et Christophe Médart, infirmier, co-écrivent ce texte dans le but de réfléchir à une psychiatrie bientraitante. Ils nous livrent ainsi un témoignage de l’intérieur et questionnent l’écoute que l’on accorde aux patients, à leur ressenti, à la signification que peuvent avoir certains dispositifs de soins.
La question du soin « intensif » notamment est soulevée, à travers l’exemple de la chambre d’isolement, qui peut contenir les comportements dangereux et violents mais peut aussi faire office de punition ou de menace. Comment cette nécessité de contenir les patients est-elle pensée dans la démarche soignante?
Comment faire face à l’urgence, à la violence du milieu psychiatrique, tant du côté des patients que des soignants? Y a-t-il un dialogue possible entre l’institution et les patients, dont les intérêts parfois s’opposent? Comment prendre en compte la personne et sa singularité dans un milieu qui doit de plus en plus se plier aux normes de sécurité et au principe de précaution? Bref, les questions de Michel Foucault se posent à nouveau à travers cet écrit: comment la psychiatrie peut soigner si elle a un discours de pouvoir et de normativité?
Extrait de l’avant propos:
« Je sais que le mot folie choque beaucoup de monde. Nous sommes à l’ère des euphémismes, mais je n’aime pas les euphémismes, qui vident la chose de tout sens, qui lissent, qui effacent ce qui fait peur. On préfère parler des symptômes, de troubles, chacun étant codifié dans le DSM, au point que des numéros peuvent remplacer les mots. Sans doute préfère-t-on être atteint du trouble numéro un tel que d’être dit fou. Mais tout dépend ce qu’on met derrière le mot fou. Je ne me considère pas comme folle, mais j’ai été folle. La folie n’est pas forcément un état permanent, ne veut pas dire qu’on hurle en se tapant la tête contre les murs sans arrêt. Ce que je n’aime pas dans les codifications, c’est qu’on oublie la personne qu’il y a derrière. On a un symptôme, auquel correspond tel médicament et ça s’arrête là. »