Article-invité rédigé par Betty, psychologue spécialisée en Thérapie Emotionnelle Cognitive et Comportementale, ainsi qu’en hypnose thérapeutique. Créatrice du blog et compte Instagram “Blabla de psy”, son but est de rendre accessibles des outils pratiques et bienveillants pour celles et ceux qui sont prêts à intervenir sur leur développement. 

L’histoire


« Tu n’es pas entré ici pour acheter des livres, Beck. Tu n’avais pas besoin de dire mon nom. Tu n’avais pas à me sourire, ou à écouter toutes mes élucubrations. Mais tu l’as fait. Ta signature est sur le reçu. Ce n’était pas une transaction en cash, c’était un début. C’est arrivé, en vrai. J’appuie mon pouce sur l’encre humide du reçu, et Guinevere Beck imprime sa marque sur ma peau »


Et si laisser un reçu à votre nom pouvait faire basculer votre vie à tout jamais ?



Joe Goldberg est libraire, à New-York. Guinevere Beck, écrivaine en herbe, entre dans sa boutique. Elle est légère, lumineuse. Son style est simple, vaporeux, presque provoquant selon lui. Il devine les formes de son corps sous ses vêtements. Et quasi-instantanément, en un regard, il tombe éperdument amoureux. Ils échangent quelques mots, et à peine sortie de sa boutique, Joe connaît tout de l’image qu’elle donne d’elle sur les réseaux sociaux. La vie qu’elle s’est construite. Il devient obsédé par Beck, persuadé qu’elle est la femme parfaite. Et lui, l’homme idéal pour elle. Convaincu qu’elle a besoin de lui, il est déterminé et prêt à tout pour entrer dans sa vie. Il ne reculera devant aucune fantaisie pour contrôler tous les fruits du hasard, jusqu’à faire d’elle sa marionnette. Comme si tomber amoureux pouvait se provoquer. Vous diriez que non. Joe, lui, est un vrai instrumentiste.


L’élégance au service de la perversion : qui est Joe Goldberg?


Il est ténébreux, élégant, un brin mystérieux. Éperdument romantique. Son regard est perçant, profond. Le regard qui fait que vous vous sentez unique. Le genre qui fait vibrer le cœur de la midinette passionnée qui se cache en vous. Ce qui saute au yeux en premier, c’est son charme presque magnétique.


Qui est Joe Goldberg ?

Profil psychologique d’un tueur



Dès leur rencontre, dès les premiers instants (de la série et du livre), on observe que Joe est d’emblée convaincu que Beck est amoureuse de lui. C’est une évidence, c’est comme cela qu’il justifie qu’elle a par exemple laissé son nom sur le reçu de sa carte bancaire: pour qu’il la retrouve! (aux USA, c’est une obligation pour rappel, de signer les reçus bancaires…). Joe est fou amoureux de Beck, ou plutôt de l’image qu’il a d’elle. Refusant ses erreurs passées, ses relations. Il est amoureux, et elle devrait être et agir selon son idéal, son cadre de valeurs inflexibles. Il fera tout pour la soumettre à sa vision de l’amour et rétablir les choses, quitte à la tuer: Beck doit être conforme à l’image qu’il a d’elle.


Joe est un personnage torturé dont l’enfance est terrifiante. Tout commence là. Il a été lui même sous l’emprise d’un parent étant jeune. Il a donc appris ce fonctionnement et cela lui a laissé des séquelles psychologiques, en toute apparence. Dans la première saison, on voit Joe être lui même enfermé par son “mentor” dans la cage qui se situe à la cave. Cage où il commettra lui même ses crimes. Il rejoue des scènes de son passé avec ses victimes. Essayant de leur inculquer ses valeurs avec violence. Les auteurs de violence ont souvent appris cette violence par les référents adultes avec lesquels ils ont grandi. Il leur semble donc naturel de les répéter, car c’est ce qu’ils ont appris. Joe a donc appris que l’autre face de l’amour était la haine. Il fait passer ses idées avec la violence qu’il a lui même subie étant enfant.


D’ailleurs, Joe a commis son premier meurtre tôt dans l’enfance. Son instinct de sauveur était déjà à l’oeuvre: il tue son père pour sauver sa mère. Il est profondément inscrit dans son système de valeurs que pour protéger quelqu’un que l’on aime, on éradique les parasites, les dangers potentiels. Et c’est ce qu’il répétera adulte, avec Candace puis avec
Beck. Il confond amour et obsession. Pour obtenir l’amour de Beck, il manipule sa vie, ses amis, ses emails… Sa façon de « stalker » Beck dès les premiers instants révèle d’ailleurs ce lien passionnel.


Diagnostic de Joe Goldberg vu par une psy



La plupart de ses fans, et des médias, décrivent Joe comme un psychopathe. Pourtant, les éléments donnés concernant ce personnage, ne permettent pas de confirmer ce diagnostic.
Ni d’ailleurs, aucun diagnostic précis. J’ai plutôt l’impression que des traits à différents troubles ont été empruntés (c’est d’ailleurs un consensus chez les experts en santé mentale) pour en faire un personnage énigmatique et attachant. Et cela fonctionne!

On retrouve notamment des traits de la personnalité antisociale, de la personnalité narcissique. On pourrait dire qu’il a un trouble de l’attachement lié à son enfance (parents défaillants, sous emprise de son “mentor” libraire…).

Je vous détaille ici pourquoi Joe Goldberg est un peu tout cela à la fois et pourtant sans diagnostic possible.


Joe : psychopathe or not psychopathe?



Les psychopathes sont des personnages magnétiques. Qui fascinent, terrifient et interrogent à la fois. Tout à fait Joe.

Le terme psychopathe est répandu du grand public. Pourtant, il n’a que peu de sens clinique, et ne peut constituer un diagnostic en soi.

Comme l’a révélé Kevin Dutton dans son livre (La sagesse du psychopathe), il existe des psychopathes “fonctionnels”, capables de s’adapter parfaitement à la vie en société (et qui par ailleurs auraient de nombreuses qualités qui en font des leaders). Les psychopathes ne sont donc pas forcément des tueurs en série.

Le diagnostic qui se rapproche le plus du sens que l’on donne au terme “psychopathe” est le trouble de personnalité antisociale.


Joe : un trouble de la personnalité antisociale?


On pourrait donc croire de prime abord à un trouble de la personnalité antisociale.



Après tout, Joe semble manquer d’empathie pour ses victimes (saison 1). Il peut sembler indifférent aux effets de ses actes pour contrôler la vie de Beck (puisqu’à ses yeux ils sont justifiés). Cela lui permettrait d’agir de façon malsaine. Comportements qu’il rationalise (il fait du mal aux autres pour protéger Beck). Il n’hésite pas à manipuler Beck pour obtenir son amour, et à violer sa vie privée. Côté comportement malsain, doit-on rappeler ce moment très gênant où il se masturbe en pleine rue en observant Beck chez elle? On observe que Joe commet des actes immoraux et illégaux sans aucun remords, pour servir son idylle (comme tuer son ex ou sa petite amie). Enfin, il peut blâmer sa victime, Beck, pour sa cupidité.


Les personnes présentant ce trouble peuvent avoir un penchant pour le harcèlement. Point que l’on retrouve très clairement chez ce personnage, avec toutes ses victimes. Il est charmant, presque magnétique, pour arriver à ses fins. Mais c’est un charme pleinement superficiel, construit et calculé.


Néanmoins, il y a des traits présents chez Joe qui ne “collent pas” au diagnostic de personnalité antisociale. Souvent ces personnes peuvent être instables et irresponsables (financièrement, professionnellement, socialement). Ce qui n’est pas le cas de Joe dont le système de valeurs est rigide, presque immuable. Elles ont aussi une tendance à ne rien planifier à l’avance. Alors que Joe, lui, a besoin de repères fixes. De plus, le manque
d’empathie de Joe, palpable à la première saison, est démenti dans la deuxième saison.


Joe : plutôt un trouble de la personnalité narcissique?


On pourrait alors s’interroger et croire qu’il souffre plutôt d’un trouble de personnalité narcissique. La plus grande caractéristique qui pourrait nous laisser penser à ce diagnostic est le charme du personnage. Joe a aussi tendance à s’attribuer une haute importance de lui même. Il se sent spécial, “au dessus” de la société. Et il cherche quelqu’un d’aussi spécial que lui, pas une femme ordinaire. Son système de valeurs lui semble être le seul “valable”. Il a une critique acerbe et semble détaché des diktats de la société dans laquelle il évolue. On retrouve le fait qu’il pense avoir des droits sur la vie de Beck (et il va loin!).


Ces deux diagnostics pourraient coller à la violence dont il fait preuve quand il estime que des personnes lui ont fait du tort. Il tue Benji, le petit ami de Beck. Il tue sa meilleure amie Peach, ne supportant pas comment la relation Peach/Beck interfère dans leur idylle. D’ailleurs Beck a le don de s’entourer de gens psychologiquement instables! Peach et Joe ne pouvaient forcément pas se blairer puisqu’ils nourrissent la même obsession pour Beck. Et sont donc en compétition pour obtenir l’amour inconditionnel de Beck.

Maintenant soyons clairs: les personnes étant diagnostiquées avec un trouble de la personnalité antisociale ou narcissique n’ont pas tous recours à la violence physique.


On retrouve aussi un délire érotomaniaque chez Joe qui se croit persuadé d’être aimé de Beck dès l’instant où elle signe ce fameux reçu bancaire à leur rencontre. Mais là, je devrais vous parler du trouble de la personnalité paranoïaque. Mais les éléments sont trop peu nombreux pour explorer cette hypothèse.


Trouble de l’attachement


Et si à la saison 1 on aurait pu croire à un trouble de la personnalité antisociale ou narcissique, la saison 2 nous apporte de nouveaux éléments qui remettent totalement en question cette analyse.

Le diagnostic le plus probable, révélé par la saison 2, serait le trouble de l’attachement lié à ses traumatismes subis pendant son enfance.


Selon l’American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, ce trouble se développe dans la petite enfance. Il serait le résultat d’une relation malsaine avec les figures d’attachement, en raison de violence, ou de négligence émotionnelle ou physique. Cela pourrait engendrer une difficulté à gérer les émotions, des amitiés excessives, le refus de s’engager dans des situations sociales. On retrouve ici les caractéristiques du personnage. Ses figures d’attachement principales ne répondaient pas à ses besoins fondamentaux, et il s’est construit sur cette base malsaine. Ce qui explique son attachement obsessionnel aux femmes dans sa vie d’adulte. Il nourrit des histoires d’amour excessives et obsessionnelles. On retrouve aussi le caractère solitaire de Joe, qui est incapable d’avoir des interactions sociales saines sans avoir à rentrer dans un rôle.


Alors, pas de diagnostic pour Joe Goldberg?


La saison 2 serait un tellement bel exemple de l’évolution d’une thérapie et d’un diagnostic erroné en point de départ. Ce qui arrive, puisque la thérapie est un processus en perpétuel mouvement. Plus on récolte d’informations lors des échanges, plus le diagnostic peut se faire précis.


La difficulté à poser un diagnostic sur un tel personnage de fiction révèle toute la complexité du travail en santé mentale. Un diagnostic n’est jamais complètement net et les troubles peuvent se chevaucher. Ce n’est pas comme un test biologique qui viendrait dire s’il y a présence ou non d’une bactérie. C’est ce qui fait de la psychologie une science “molle”, basée sur le discours principalement. Et bien que la psychologie base ses méthodes sur une pratique rigoureuse et scientifique… Elle concerne l’étude et l’accompagnement du comportement humain. Ce qui en fait une science pas toujours exacte, mais évolutive.


Profil psychologique de Guinevere Beck



Cette série ne serait pas une réussite si tout n’était pas fait pour construire cette idylle avec un personnage qui permettrait de justifier les actes de ce tueur. Pourtant, comment pourrait on justifier de tels actes?

Beck… Elle n’est pas la femme idéale ou la parfaite oie blanche à qui l’on aurait rien à reprocher. Les réalisateurs ont tout mis en oeuvre pour qu’on lui trouve des défauts. Elle est effrontée, légère, ravissante.

J’ai la sensation que des traits ont été empruntés à deux troubles: celui du trouble de la personnalité limite (ou borderline) et du trouble de la personnalité dépendante. Néanmoins, les éléments ne sont pas suffisants pour constituer un diagnostic en soi.


Beck: borderline sur les bords?


Beck ne supporte ni la solitude ni l’idée de l’abandon. Elle montre des changements d’humeur parfois radicaux. Elle fait en sorte de s’auto saboter dans sa réussite en tant qu’écrivain. Elle semble combler un vide affectif avec ses relations. Elle montre une certaine forme de frénésie sexuelle (avec son ex petit ami, le fait de se masturber devant sa fenêtre visible aux yeux de tous…).


Beck: plutôt un trouble de la personnalité dépendante?


Elle présente des éléments de dépendance affective. Dans ses relations, elle s’attend à ce que d’autres personnes qu’elle-même prennent soin d’elle (Joe, Peach, Benji,…). Elle semble rechercher le réconfort et l’opinion des autres pour prendre des décisions. Il n’y a qu’à regarder les emails qu’elle envoie à ses amis, pour savoir ce qu’elle doit faire concernant toutes les situations de sa vie amoureuse! Elle se sous-estime et a beaucoup de mal à exprimer ses désaccords. Elle préfère se plier à la majorité, à l’opinion des autres, que ce soit dans sa vie familiale, amicale ou amoureuse.

Néanmoins les éléments sont pauvres.


Beck: plutôt un penchant pour la dépendance affective



Cette histoire joue à merveille le besoin avide d’amour et illustre très bien la dépendance affective. On pourrait surtout conclure que Beck recherche en l’autre l’amour d’elle-même. Ce qui la pousse à nourrir des relations de co-dépendance à la fois avec sa meilleure amie, Peach, et avec Joe.

Je crois d’ailleurs que Beck a parfaitement conscience d’être l’objet de l’obsession de Joe mais aussi de Peach. Et que cela lui permet de construire son estime d’elle-même, qu’elle est incapable de nourrir seule. D’ailleurs, le livre nous apporte beaucoup d’éléments sur cette hypothèse. Beck découvre dans les yeux de Joe une image d’elle-même qu’elle trouve reluisante. Je crois que fondamentalement, elle est amoureuse de l’image qu’elle a d’elle-même dans ses yeux à lui. Elle n’est pas amoureuse de lui. Elle lui est attachée car elle aime ce qu’il reflète d’elle. Ce qu’elle aime chez Joe, c’est ce qu’elle ressent à propos d’elle-même dans ses yeux d’homme amoureux.


Un couple parfaitement névrotique et complémentaire


N’avez-vous jamais remarqué qu’une personne qui se complète bien avec vous est celle dont la névrose complète à la perfection la vôtre?

Ici, Beck et Joe, se ressemblent et se complètent. Ils sont deux amoureux du romantisme avant d’être amoureux l’un de l’autre. Ils sont passionnés d’écriture.

Il est introverti, avec un univers intérieur si riche, torturé, complexe. Il ne montre rien. Elle est lumineuse, pour cacher un vide intérieur. Elle s’invente une vie pour oublier qu’elle ne sait pas qui elle est. Le héros et l’anti-héroïne se rencontrent. La corde sensible de l’un fait vibrer celle de l’autre.

Lui, syndrome du sauveur, maniaque du contrôle. Elle le syndrome de l’abandon. Ils frôlent et jouent avec les limites d’eux-mêmes sans cesse. Et c’est pour cela qu’ils révèlent le pire et le meilleur l’un de l’autre.


Pourquoi cette histoire nous fait vibrer ?


Cette histoire d’amour complexe, vibrante, est le reflet de nos pires noirceurs. Cette passion qui vous a peut-être déjà animé et qui a fait de vous un être incontrôlable. Colère, amour, fusion. Avide d’amour. Toujours plus d’amour.



Joe et Beck : l’amour passion


On peut être attiré par l’amour passion, notamment si l’on a besoin de l’amour de l’autre. Si l’on a besoin de déterminer notre amour propre à travers les yeux de quelqu’un d’autre. Besoin de remplir un vide d’amour par l’amour d’une personne extérieure.


Et c’est ce que le personnage de Joe propose: couvrir Beck d’amour, avec sa propre notion de l’amour… Quitte à devoir être manipulateur pour pouvoir l’aimer. C’est ce qui rend Joe séduisant, il est prêt à tout pour que l’objet de son idylle se sente aimé. Inconditionnellement. Intensément.



On s’accroche au personnage car l’objet du délire de Joe est: l’amour! Toute l’histoire justifie ses actes au nom de l’amour. Quitte à être un tueur. C’est comme si une part de notre esprit ne retenait que son romantisme, l’histoire d’amour, et ne voulait pas voir sa part d’ombre (on appelle ça l’abstraction sélective).


Cela nous rappelle tout ce dont on peut être capable par amour. Mentir, trahir, justifier. Les plus grands romantiques sont capables des plus grandes folies. Les demandes en mariage dans les grands stades sur grand écran ne vous ont-il jamais fait rêver? Tout l’univers de la série fait vibrer cet espoir et ce rêve de l’amour passion.


Dans la tête de Joe en permanence: on s’attache à lui


Tout est fait pour optimiser l’émotion de l’amour et de la compassion. La voix off de Joe dans la série (que l’on n’a pas dans le livre) le rend terriblement séduisant. Cette voix justifie ses actes par sa sensibilité, ses failles, sa propre souffrance. De plus Joe se présente comme un sauveur.


L’accès illimité aux pensées de Joe nous fait nous attacher à son personnage. On se sent proche de lui. On pourrait presque s’identifier à son besoin d’amour, à ses souffrances, à ses justifications. On est connectés en permanence à l’esprit de Joe. Et il faut dire que les réalisateurs de Netflix s’y prennent très bien pour ça. Le livre est écrit par Joe, on est en permanence dans sa tête. Pourtant je n’ai pas ressenti à la lecture le même sentiment d’attachement au personnage, du dégoût plutôt même. Dans la série, on pourrait ressentir une forme de pitié ou compassion pour son histoires et ses distorsions.


Des flashback émouvants de son enfance


Les flashbacks avec les souvenirs vécus avec sa mère, emprunts de violence… nourrissent notre empathie et la compréhension du développement de son trouble de l’attachement. Il nous est présenté comme un enfant qui s’est construit comme étant abusé, et seul au monde.


Une anti héroïne que l’on peut détester pour justifier les horreurs



Enfin, on l’a vu précédemment… Beck a des défauts ; elle est frivole sur les bords (elle a d’ailleurs trompé Joe), elle utilise le mensonge et la manipulation… La recette est ainsi réalisée pour que l’on puisse la détester, et justifier d’autant plus les actes de Joe. N’avez vous jamais entendu dire à propos d’une victime de viol “oui ben elle n’avait qu’à pas se promener en jupe en pleine nuit!”.

Son personnage permet de coller à cette triste réalité: il est facile de trouver des failles chez cette victime de violence. Cela permet de minimiser l’injustice que peut vivre Beck et le fait qu’elle n’y est pour rien.


Oui Beck est imparfaite. Imparfaite au point d’être tuée?


Oui mais… les actes sont-ils justifiables? Face à nous-même!


Je crois qu’un point de cette série satirique est de faire le bilan avec nous même: jusqu’où sommes-nous prêts à pardonner le crime à un homme? Sommes-nous prêts à pardonner que Joe tue Beck parce qu’elle l’avait trompée et qu’elle refuse d’être l’amoureuse idéale d’un fou?


Dans la deuxième saison, le personnage va encore plus loin. Il rencontre son égale, son âme soeur. Deux âmes torturées qui agissent selon le même système de valeurs: l’amour-contrôle quitte à commettre des meurtres. Jusqu’où iront-ils? S’entretueront-ils au nom de l’amour? Affaire à suivre…


Repérer l’emprise d’une personne toxique


Je ne pourrais pas terminer mon propos sans faire un peu de prévention.


Cette fiction est enivrante, parfois navrante. Et elle interroge profondément sur nos propres capacités à pardonner et à justifier les comportements malsains.


Même si les traits du personnage sont empruntés à plusieurs troubles… Vous pourriez très bien être victime d’un harceleur ou d’un pervers narcissique dans votre vie. Je déteste ce terme de pervers narcissique qui n’a aucun sens clinique. Mais la compréhension de ce terme est largement partagée… Je l’utilise ici pour faire référence au sens commun qu’on lui donne. Quoi qu’il arrive, vous pourriez souffrir d’une relation avec une personne toxique.


La frontière entre amoureux idéal et pervers narcissique, une limite parfois bien mince.


Toute relation passionnelle entretient la dépendance et l’emprise. La relation passionnelle nourrit le besoin d’être aimé et regardé à travers l’autre.


Dans la culture, depuis la nuit des temps, l’amoureux idéal est celui qui nous fait vivre, mais aussi mourir d’amour parfois (Roméo et Juliette, You, Twilight, …).


Cette série est dérangeante et satirique. Elle nous fait nous interroger sur nos comportements sociaux malsains. Elle nous fait aimer et justifier les actes terribles réalisés par un homme héros. Elle nous fait critiquer les femmes, trouver des raisons (pourtant injustifiables, y a t-il des raisons de mériter mourir?) au fait que Joe puisse les tuer.


Pourtant, à la fin de la saison 1, Beck soulève un point essentiel derrière sa machine à écrire: aucun homme n’a le droit de contrôler la vie d’une femme. La femme a son libre arbitre. Aucun contrôle ne peut être fait sur la vie d’une femme, même sous prétexte de vouloir son bien. Les femmes dans cette série sont des anti héroïnes, on pourrait presque détester Candace, et Beck. Ce qui changera peut-être avec le personnage de Love, dans la saison suivante…


Voici mes meilleurs conseils si vous êtes dans une relation d’emprise:


  • Si vous croisez quelqu’un de trop charmant: fuyez. C’est romantique et attrayant mais c’est souvent la caractéristique première d’une personne qui a un trouble de la personnalité narcissique.
  • Si vous avez l’impression qu’une relation vous fait sentir mal, nulle ou isolée… Soyez convaincue que ce n’est pas de votre faute.
  • Sortez du silence. Parlez-en à une personne de confiance: un proche ou un professionnel de santé. Car ce genre de relation est construite de sorte à ce que vous ne puissiez pas vous rendre compte de son caractère malsain.
  • Entamez un travail sur vous même si vous avez la sensation de répéter ce type de relation ou de n’attirer que ce genre de personnages
  • Entourez-vous un maximum de personnes qui vous font sentir bien
  • Quitter les relations toxiques

To be continued…


Je dois avouer que j’ai complètement binge-watché la série (phénomène auquel Netflix a mis un terme, et si vous êtes comme moi, c’est très frustrant!). Ma curiosité de psy a été mise à rude épreuve. Et le personnage m’a fasciné. J’ai eu envie de comprendre le personnage de Joe et j’ai carrément eu l’envie frénétique d’aller fouiller dans sa tête et son passé. Alors j’ai entrepris la lecture du livre dont la saison 1 est adaptée.


Et je dois vous dire une chose: ma curiosité n’est à ce jour pas assouvie. Il y a beaucoup de points qui différent je trouve, dans la psychologie de Joe… Entre le livre et l’adaptation réalisée par Netflix… J’attends, comme vous sûrement, la saison 3 😉 Je vous retrouverais peut-être pour la suite ! Alors à bientôt et n’oubliez jamais: vous avez le choix de vos relations. Choisissez les meilleurs pour votre bien-être et votre épanouissement.