Comment se reconvertir en psychologue du travail avec le Cnam ? J’aurais aimé tomber sur ce type d’articles il y a cinq ans lorsque j’hésitais à m’inscrire, je vais donc essayer d’être la plus factuelle possible.

La chaire de psychologie du CNAM propose (entre autres) un diplôme de psychologue du travail inscrit au RNCP.

Comment résumer le CNAM… C’est une institution, les professeurs sont tous des sommités en la matière. Après une rapide enquête métier, j’ai rapidement été rassurée par sa réputation. J’ai hésité avec les formations de Paris 8 mais la spécialité (travail) et le rythme (cours du soir) du CNAM m’ont rapidement convaincus.

On retrouve dans ces cours du soirs tous types de profils : des conseillers Pôle Emploi, des représentants syndicaux, des coachs, des personnes travaillant dans les ressources humaines, des psychologues d’autres branches, des analystes financiers, des informaticiens… Le dénominateur commun est souvent un moment de rupture dans sa vie professionnelle, associé à un intérêt pour la psychologie mais pas toujours : beaucoup s’inscrivent dans ces cours du soir pour ajouter la psychologie du travail comme “outil” dans leurs pratiques professionnelles. Pour le dire autrement, on ne parle pas (que) de reconversion dans les couloirs.


Mon histoire, en bref

J’ai travaillé dans la communication digitale et le web pendant près de dix années. J’avais fait le tour et il y avait toujours, tapie dans l’ombre, cette interrogation : ”Pourquoi avoir choisi lors de mes 20 ans des études de communication et pas de psychologie ?” La réponse m’est apparue plus tard, sous une forme plutôt simple : parce qu’à 20 ans, je n’étais pas mûre pour cela.

Beaucoup de lectures, des amies inspirantes travaillant dans le métier… l’idée germait dans ma tête… sans oser me lancer.

En parallèle, le monde du travail m’interrogeait, je ne restais maximum que 18 mois sur tous mes postes, je finissais toujours par m’y ennuyer. Pourtant j’adorais tout le décorum du monde du travail : les entretiens, la recherche d’emploi, l’intégration, l’apprentissage des nouveaux codes et pratiques…

Alors que l’ennui devenait de plus en plus présent dans mon quotidien, je pris la décision un été de m’inscrire au CNAM. Le cursus me parut long, un peu obscur mais j’y suis allée étape par étape.


La journée Portes Ouvertes

Je ne peux que recommander d’y aller traîner ses guêtres afin de rencontrer les professeurs et de poser toutes les questions qui sont en suspens. Elle a lieu traditionnellement en septembre, très peu de temps avant les inscriptions.


Le parcours

Il se décompose grossièrement en 5 années. La première année est destinée à inculquer les basiques de la psychologie : psychologie cognitive, sociale, clinique et… celle qui fait peur (et vous avez raison) : les statistiques. Cette dernière peut être évitable si vous prouvez, notes à l’appui, que vous avez suivi un enseignement en statistiques. Sinon, zou, c’est parti pour la courbe de Gauss et le test de Student. Il est recommandé de suivre 2 cours (un cours = 3h, de 18h à 21h) par semestre, sinon c’est trop “lourd” : les étudiants ici sont censés travailler en parallèle.

Vient ensuite en seconde année les cours autour du travail : psychopathologie, clinique de l’activité et du dialogue. Normalement, si vous aimez ces cours, c’est que vous êtes à la bonne place.

Certaines personnes au chômage essayent de tout passer en un an, c’est possible, mais costaud (et déconseillé par les professeurs). Ces cours théoriques, délivrés en amphi, sont complétés par des cours en TD, facultatifs, pour ceux qui veulent creuser les matières.


L’année pratique

Après un agrément accordé par l’équipe pédagogique – une sorte d’entretien avec l’un des professeurs afin de valider votre motivation – c’est parti pour l’année pratique, très riche, qui demande pas mal de travail chez soi : on y apprend à travailler sur sa propre relation au travail via la méthode d’instruction au sosie (dispositif d’auto-confrontation qui se fait en groupe et qui permet de travailler son rapport au travail…On s’intéresse à la question du « comment » je fais mon travail plutôt qu’au « pourquoi »), et on s’exerce à discuter sur les textes importants en psychologie : l’idée ici est d’acquérir et d’affiner un regard.

J’ai adoré cette année. Idem, si vous aimez, c’est que vous êtes vraiment à la bonne place !


…et la suite ?

Cette année, je valide uniquement un module de méthodes psychométriques, un cours obligatoire mais pas très mis en valeur par l’équipe. On y étudie les tests, on est un peu loin de l’approche clinique préconisée par l’équipe pédagogique. Viendra ensuite le PST118 où l’on passe enfin à l’action avec une intervention en duo dans un milieu professionnel. D’après mes pairs, c’est l’éclate, mais un peu stressant pour ceux qui ont eu mal à travailler à deux et/ou qui ne sont pas arrivés à trouver une entreprise à temps.

Il faut avant de se présenter en dernière année écrire un rapport de stage sur une expérience que l’on aurait acquise pendant le cursus dans le domaine de la psychologie du travail. Il faut donc se réserver a minima trois mois afin d’expérimenter la réalité concrète du “domaine”. Bon à savoir, l’acceptation du “domaine de la psychologie du travail” semble large et mêmes les professeurs ne semblent pas d’accord sur ce point.

Vient ensuite la dernière étape, la dernière année, avec la rédaction d’un mémoire et une série de séminaires tout au long de l’année.

Vous l’avez compris, je n’en ai pas terminé ! Mais cela fait déjà cinq années que je passe mes soirées et parfois mes journées – car certains cours sont proposés le jour – rue Gay-Lussac.

Il faut une certaine dose de motivation et surtout d’organisation mais ces cours en valent la peine. Il y a une forme de solidarité entre les élèves : on apprend dès nos études à créer du collectif. Le fait que l’apprentissage se fasse de manière longue est particulièrement opérante, puisque il y a forcément des échos des cours sur sa propre pratique professionnelle.


Les tarifs

Hyper accessible par rapport aux formations privées, évidemment. Selon le nombre de cours que vous prenez dans l’année, c’est environ 370€ par semestre.


Et côté débouchés ?

Comme écrit plus haut, le débouché n’est pas forcément d’être psychologue du travail. On peut s’engager dans les ressources humaines, le conseil en insertion professionnelle, la formation… un module délivré pendant le premier cycle “le travail et l’emploi” aide à faire le tri. En cinq à sept années d’études, vous avez globalement le temps de réfléchir et d’affiner votre projet pour qu’il soit le plus épanouissant possible.


… et enfin, mon projet ?

Pour ma part et depuis mon inscription au CNAM, je travaille en tant que coordinatrice pour les Ateliers Durables, une structure qui promeut la santé et la qualité de vie au travail en entreprises. C’est un emploi que j’ai trouvé peu après ma démission de mon ancien poste de communicante. Suivre ces cours  m’a permis de me construire un point de vue qui a aidé à mon recrutement. 
Ce n’est néanmoins pas forcément un bon point pour mon cursus : nombre de professeurs du CNAM critiquent le retournement des psychologues du travail au service de ce type de fonctions faisant la promotion d’ une qualité de vie au travail qui serait factice car tournée vers l’entreprise plutôt que vers le soin apporté aux salariés. Cette mission me permet néanmoins d’être à un poste d’observation intéressant pour mon avenir où je vois plusieurs pistes se dessiner : m’orienter vers l’accompagnement individuel des personnes en transition professionnelle et proposer des ateliers ou des formations à destination des salariés afin de développer le fameux « pouvoir d’agir » essentiel pour une bonne santé au travail. 


Les profs du CNAM

  • Christophe Dejours, star de la psychodynamique du travail, j’ai eu la chance d’assister à sa dernière année.
  • Yves Clot, qui venait juste d’arrêter l’enseignement au moment où j’ai commencé les cours mais dont l’ombre plane sur tous les cours.
  • J’ai adoré les cours de Katia Kostulski (même si son partiel m’a valu un rattrapage, je crois que ma fan attitude m’a fait perdre mon sens commun)